« Le loup-garou et la déesse de l’Aurore celtique », Michaël Tonon
« Le
loup-garou et la déesse de l’Aurore celtique »
Michaël
Tonon
in :
BSMF
(Bulletin de la Société de Mythologie Française) n°248 de
septembre 2012, avec le titre de Sainte
Austreberthe et la déesse de l’Aurore.
Voir
le PDF du même nom, trouvé sur academia.edu.
Traite
des deux articles :
Anne
Marchand, « Sainte
Austreberthe, Brighid, un âne et un loup vert », BSMF,
n°244 et 245, 2011
*
[Version abrégée de l’article]
1. Introduction
1. Introduction
Anne Marchand ouvre des perspectives
très intéressantes sur la
préservation dans le christianisme de rites d’origine païenne :
elle présente Sainte Austreberthe et la confrérie des
Loups Verts associée à son
culte, avec un lien entre la sainte et la déesse de
l’Aurore. C’est ce lien que nous développons ici, avec
d’autres contextes indo-européens.
2.
La déesse de l’Aurore à Rome et en Inde
Rome connaît une déesse de l’Aurore,
étudiée par Dumézil : c’est Mater Matuta. Son nom a donné
l’adjectif matutinus (matinal). Les Romains l’honoraient dans une
fête, les Matralia :
« Sa fête était fixée en effet
au 11 juin, c’est-à dire, peu avant le solstice d’été, au
moment où la durée du jour qui n’a cessé depuis 6 mois de
croître, semble se stabiliser et bientôt commencera le recul qui, 6
mois plus tard, aboutira à la crise du solstice d’hiver. Il est
donc probable que l’intention de la fête ainsi placée était
d’encourager l’aurore contre l’accroissement du temps nocturne,
ou de la renforcer contre sa propre lassitude ».
Les deux rites connus des Matralia
vont, selon G. Dumézil, dans ce sens : la fête donnait lieu à une
cérémonie à l’intérieur du temple de la déesse. Les dames
romaines s’y retrouvaient et on introduisait au milieu d’elles
une esclave, que les matrones expulsaient violemment en la flagellant
; puis ces dames soignaient non leurs enfants mais les enfants de
leurs soeurs.
D’après G. Dumézil, les dames
romaines rassemblées sont appelées les bonae matres et représentent
les aurores. En effet, l’aurore est vue comme multiple, une par
jour : en Inde, l’Aurore est nommée aussi bien au singulier qu’au
pluriel. En milieu indo-européen, l’Aurore est la soeur de la
Nuit. En Inde, Usas (l’Aurore) constitue un couple sororal avec
Ratri, la (Bonne) Nuit : on les appelle « les deux soeurs ». Ratri,
la Bonne Nuit s’oppose à la Mauvaise Nuit. La Bonne Nuit est la
mère du nouveau soleil qui apparait le matin. En se retirant, elle
confie le bébé à sa soeur l’Aurore, qui est donc sa tante.
En effet, chez les Romains comme chez les peuples indo-européens, le
jour commence à minuit et donc démarre par une partie nocturne
dans laquelle le soleil de l’aube va naître de sa mère la (Bonne)
Nuit. Mais celle-ci, lorsque les rayons du bébé font apparaître le
jour, ne peut pas accompagner son jeune enfant qu’elle confie alors
à l’Aurore.
Ce processus peut être contrarié par
la Mauvaise Nuit qui souhaite retenir le soleil et rallonger la nuit.
Les Aurores chassent donc violemment cette Mauvaise Nuit, symbolisée
par une esclave.
3.
L’Aurore dans la vie de sainte Austreberthe
Anne Marchant avait déjà souligné
des liens entre la sainte et l’Aurore, que nous allons renforcer :
- Austreberthe signifie la « Brillante de l’Est », pour désigner l’Aurore amenant le Soleil ;
- La mère de la sainte apprend par un ange que sa fille « aurait de nombreuses filles dans la maison du Seigneur ». Cette descendance a été interprétée sous la forme de religieuses. Mais cela désigne l’Aurore, mère en commun avec sa soeur de milliers de jeunes soleils.
- L’épisode de l’incendie dans le four : « un jour qu’elle était chargée de cuir le pain, elle voulut ôter quelques braises. Son balai s’enflamma avec une telle violence que le pain de la communauté était en péril. Placide, Austreberthe calma les religieuses affolées, se signa, entra dans le four embrasé et le nettoya sans que les flammes ne la touchassent ». Le pain dans le four brûlant est une métaphore du jeune soleil dont l’Aurore doit prendre soin. Le pain, comme le bébé soleil, est encore enfermé en vase clos, matrice qui est celle de la Nuit et d’où l’Aurore le recueillera. Elle ne craint pas le caractère igné et la forte chaleur du pain/soleil. L’épisode rappelle un rite des Matralia qui consistait à préparer des galettes jaunes comme le soleil : « Varron dit que ceux de Mater Matuta étaient appelés testuatium parce qu’on les préparait in testu caldo, c’est-à dire dans un récipient de terre cuite fermé, chauffé. L’importance donnée au contenant fait allusion à un pôle théologique de l’aurore : le gâteau jaune offert à la déesse Aurore est cuit dans un moule, comme le soleil est préparé de façon cachée dans le sein de la nuit avant d’être dégagé, recueilli par l’Aurore ».
- Dans son premier monastère, Austreberthe est victime d’un groupe de moniales dirigé par Aurée. Celles-ci disent qu’Austreberthe maltraiterait Aurée, au point que son père vient menacer de mort la sainte avec son épée. Cette épisode évoque le rite des Matralia mais de façon inversée : les « bonnes mères » qui symbolisent les Aurores sont remplacées par des soeurs menées par Aurée (l’aurore). Les bonnes mères fouettent une intruse (l’esclave) qui symbolise la Mauvaise Nuit et l’expulsent du temple. Ici, de façon inversée, la méchante Aurée remplit l’office de l’aurore et Austreberthe de la Mauvaise Nuit expulsée.
- Enfin, la fonction de blanchisseuse de sainte Autreberthe est une image de l’Aurore, qui fait « blanchir la campagne » comme dit le poète.
4.
Le rôle des Loups Verts
4. 1.
L’étymologie du loup vert
La sainte emploie un âne pour convoyer
le linge à blanchir entre Pavilly et Jumièges. Il suscite la
gourmandise d’un loup affamé. Le loup se jette sur l’âne et le
dévore. La sainte intervient pour convertir le loup et en faire le
remplaçant docile de l’âne pour la livraison du linge. Cet
épisode va marquer la représentation de la Sainte qui sera
accompagnée d’un loup domestiqué et va conduire à la formation
de confréries de Loups Verts.
Le loup vert est tout simplement un
loup-garou, ou homme-loup : werwolf en allemand. wër « homme »
et wolf « loup », varulvstro en Scandinave, garwalf en normand,
puis garou, varou ou Loup Brou en Bourgogne. le Loup Vert vient du
wër ou var et dans les deux cas désigne l’homme, éventuellement
de mauvaise réputation (« hors-la-loi » ou déjà « loup »).
4. 2. Rappels
sur les confréries du Loup Vert
Les confréries, attestées depuis le
Moyen-âge, s’appellent respectivement « confrérie de Saint-Jean
» (Jumièges) et « confrérie du Ver Montant » (Montreuil) (cf
soleil montant) : elles étaient en relation avec des monastères de
femmes. Toutes les deux mettaient en relation le culte de Sainte
Austreberthe (et son loup) avec Saint Jean le Baptiste, car
l’activité principale des deux confréries consistait en une
manifestation à l’occasion de la Saint-Jean (23 juin). Le nom de
Ver Montant renvoie au Werwolf ou Varou. Les deux confréries
devaient choisir pour l’année, la veille de la Saint Jean, le Loup
Vert ou Loup, et de procéder à sa crémation symbolique.
A Jumièges, le choix du nouveau Loup
Vert est effectué le soir, après que le bûcher de la saint Jean
ait été allumé par un jeune homme et une jeune fille. L’opération
est compliquée par un autre frère de la confrérie, dont la tâche
est de fouetter les loups de la chaîne pendant qu’ils essayent de
capturer le Loup Vert. Lorsque le nouveau Loup Vert est choisi, il
est porté jusqu’au feu où on fait semblant de le jeter. Le
déroulement à Montreuil était semblable : les frères de la
confrérie défilaient la veille de la Saint Jean, le 23 juin, avec à
leur tête leur président qui portait une charge de linge, rappelant
ainsi l’épisode du loup de sainte Austreberthe. Le soir, un couple
d’un jeune homme et d’une jeune fille mettait le feu au bûcher :
l’ancien Loup et ses confrères poursuivaient alors autour du
brasier le Loup de l’année suivante. Lorsqu’ils l’avaient
capturé, ils feignaient de le jeter dans le feu.
4.
3. Essai d’interprétation sur le loup de Sainte Austreberthe et le
Loup Vert :
4. 3. 1. Indra
et Usas
L’Inde a conservé une tradition liée
au chariot de l’Aurore védique, appelée Usas. C’est une bonne
déesse qui prodigue les dons qu’offre le jour. Ces dons sont
transportés dans le char de l’Aurore :
« Avec toute chose agréable, luis
pour nous au loin, Aurore, fille du Ciel ! Avec le haut prestige, ô
rayonnante, avec la richesse, ô déesse, toi qui détiens les dons !
[…] Aurore, arrive avec les biens heureux, du haut de l’espace
lumineux du ciel. » (Rig Veda I, 48).
Or ce service peut être contrarié et
plusieurs hymnes font la louange d’Indra pour avoir sauvé la
déesse de ténébreux démons. Mais il arrive que le problème
vienne de la déesse elle-même, qu’elle n’ait plus la vigueur ou
la volonté nécessaire pour mener sa mission. Et dans ce cas, Indra
intervient pour châtier la déesse et la ramener à son devoir. Il
est en cela dans son rôle car une de ses fonctions est de corriger
toute infraction au fonctionnement harmonieux des grands rythmes de
la nature. L’apparition du soleil est une victoire qu’Indra
remporte sur elle autant que sur les ténèbres. Tout comme G.
Dumézil, nous pensons que ce retard coupable de l’Aurore a une
signification saisonnière et qu’il correspond à la période où
les jours vont commencer à se raccourcir.
4. 3. 2.
L’Aurore paresseuse à Rome
G. Dumézil a montré que
l’intervention musclée d’Indra a subsisté à Rome à travers le
rite des Quinquatrus Minusculae, qui avaient lieu le 13 juin,
deux jours après les Matralia : ce jour là célèbre la confrérie
des tibicines (flûtistes) qui défile en robes longues et travestis
en femme. Cette fête était censée commémorer un épisode de
l’histoire de cette confrérie : les flûtistes avaient fait grève
et ne voulaient pas reprendre leur service (comme Usas faisait
traîner pour faire le sien) ; ils s’étaient retirés à Tibur.
Devant les injonctions du Sénat, les habitants les firent revenir à
Rome par une ruse : ils organisèrent une fête au cours de laquelle
les tibicines s’enivrèrent. Les habitants mirent les flûtistes
abrutis par le vin dans un chariot pour Rome. Ils arrivèrent le
matin, endormis. Pour cacher leur honte, un des membres du Sénat
leur fait mettre des robes et des masques et ils abandonnèrent ainsi
le chariot pour reprendre leur activité professionnelle.
Or G. Dumézil a retrouvé dans le
récit étiologique de la fête les éléments fonctionnels de
l’épisode du chariot d’Usas et d’Indra : il a prouvé que les
Romains avaient maintenu une cérémonie destinée à « activer »
l’Aurore, mais, sa fonctionnalité n’étant plus comprise, elle
avait été rationnalisée sous la forme d’une histoire arrivée à
la confrérie des flûtistes. Or cette cérémonie est destinée à
stimuler l’Aurore à l’entrée de la période où elle va
commencer à perdre du terrain.
Cette cérémonie est à mettre en
rapport avec une autre. Il existe à Rome un dieu archaïque assez
mystérieux, Summanus. Ce dieu se manifeste par des éclairs
nocturnes, juste avant l’aube (« fulgur submanum ») :
l’étymologie de ce dieu (« à l’approche (sub) du matin (mane)
») en fait un dieu qui joue son rôle juste avant l’Aurore et se
manifeste par des éclairs. Or ce dieu a sa fête le 20 juin. Dans
les rares faits connus concernant ce dieu, Ovide nous rapporte qu’on
offrait le 20 juin, en son honneur, des petits gâteaux ronds et
jaunes qui évoquaient le soleil, signe du rôle bénéfique de ce
dieu dans la préservation de l’astre du jour.
Nous faisons ici l’hypothèse que
Summanus est l’appellation du dieu tonnant (Jupiter à Rome,
Taranis en Gaule) dans sa fonction nocturne de stimulation violente
de l’Aurore, ce que suggère la proximité de sa fête avec les
autres fêtes liées à l’Aurore. Les éclairs nocturnes observés
la nuit avant l’aurore passaient selon nous pour la manifestation
de la « raclée » que le dieu de l’Orage donnait à l’Aurore
pour lui rappeler son devoir et accélérer son service.
Une autre fête romaine fait partie de
la démarche liée à l’aurore : les lupercales. Cette fête
avait lieu le 15 février : une confrérie d’hommes-loups, les
Luperques, faisaient un banquet suivi par une course au cours de
laquelle ils fouettaient les femmes avec des lanières en peau de
bouc. Ce rituel était perçu comme un rite de fécondité, la
flagellation stimulant la fécondité des femmes romaines.
Or nous soupçonnons cette confrérie
d’hommes-loups, au coeur de l’hiver, de vouloir en fait stimuler
la naissance journalière du nouveau soleil, pour qu’il arrive plus
tôt et que les jours continuent à s’agrandir. Les dames
fouettées, comme dans les Matralia, peuvent symboliser les Aurores
ou les Bonnes Nuits, toutes les deux co-mères du soleil quotidien.
Les coups de fouet doivent stimuler leur action de mère et leur
faire accélérer le mouvement.
Manifestations liées à l’Aurore :
grande logique dans le soutien à l’activité du lever du soleil :
Date
|
Fête
|
Objectif
|
Etape
dans le processus
|
15
février
|
Lupercales
|
Stimuler
la fécondité des deux soeurs Bonne Nuit / Aurore afin que le
nouveau soleil puisse naître
|
Conception
/ Naissance nocturne du soleil
|
11
juin
|
Matralia
|
Conjurer
la Mauvaise Nuit qui retient trop le soleil au lieu de le donner à
l’Aurore pour que le jour se fasse. Favoriser le passage du bébé
soleil de la nuit à l’aurore.
|
Passage
du bébé entre la nuit et l’aurore.
|
13
juin
|
Quinquatrus
Minusculae
|
Sanctionner
l’Aurore lorsqu’elle fait preuve de nonchalance
|
Amener
le bébé à destination à temps, c’est-à dire dévoiler le
soleil pour que le jour puisse commencer sans retard.
|
20
juin
|
Fête
de Summanus
|
Fêter
le dieu tonnant qui stimule l’Aurore et qui va voir son activité
prendre de l’importance, les jours allant bientôt décroître.
|
4. 3. 3.
Interprétation de la légende de Sainte Austreberthe et des
Loup-Verts :
On peut noter que le loup et son
représentant, le Loup-Vert, ont un statut particulier dans le culte
de Sainte Austreberthe : en effet, le loup de la vita n’est pas
mauvais. L’Eglise n’aurait jamais toléré la création d’une
confrérie vouée à un être satanique : le Loup Vert était
donc perçu comme un personnage positif, intervenant contre les
puissances mauvaises.
Dans le monde païen, le loup pouvait
être associé au dieu tonnant : à Rome, la louve et le loup étaient
les animaux du dieu Mars, dieu guerrier qui a perdu sa foudre au
profit de Jupiter mais qui était l’homologue d’Indra, dieu
guerrier et tonnant indien. Chez les Slaves, le loup est l’animal
de Saint Georges, à qui il obéit, et Saint Georges est un
descendant du dieu tonnant, Taranis en Gaule.
La crémation du Loup Vert est le début
d’un nouveau cycle qui vise à encourager l’Aurore à ne pas
succomber afin que le jour continue à se lever. C’est cette tâche
associée à la préservation du soleil quotidien qu’incarne le
Loup Vert, représentant du dieu tonnant Summanus/Jupiter/Taranis :
c’est un charbon du bûcher du Loup Vert qui doit servir à
rallumer le feu à la Noël, c’est-à-dire au solstice d’hiver,
lorsque les jours vont se remettre à croître. Le Loup Vert est bien
le garant du jour quotidien : après sa mort symbolique, ses cendres
contiennent son principe actif d’accélérateur du soleil, et vont
permettre d’assurer la rallonge des jours à partir du solstice
d’hiver jusqu’au prochain bûcher de la Saint Jean.
Nous pensons donc que le loup évoque
l’action du dieu tonnant son maître pour stimuler l’action de
l’Aurore. Dans la légende de Sainte Austreberthe, le soleil
naissant est évoqué par la charge de linge blanchi : Sainte
Austreberthe effectue ce transfert en hiver avec l’aide d’un âne.
L’âne nonchalant évoque le chariot pesant de l’Aurore : il va
trop lentement. Par conséquent le loup intervient : il remplace
l’âne, permettant aux jours de s’étendre. Ce loup et le Loup
Vert sont donc des représentants chrétiens du dieu Taranis /
Jupiter / Summanus / Indra qui vient activer le service de l’Aurore
(Sainte Austreberthe) à un moment charnière de l’année où les
jours vont se remettre à décliner. La confrérie du Ver-Montant
a gardé dans son nom une allusion à ce dieu « montant »,
Summanus, c’est-à dire qui commence son cycle d’intervention :
l’activité tonnante nocturne du dieu pour stimuler l’aurore va
monter en puissance avec l’allongement des nuits.
5.
Synthèse et conclusion
Fêtes romaines ou mythe indien
|
Rites chrétiens
|
15 février, Fête des Lupercales
Une confrérie d’Hommes-Loups
un jeune homme et une jeune fille.
Un banquet bien arrosé.
Ils font un tour de ville en fouettant les femmes romaines
rencontrées : stimuler la fécondité. |
10 février, naissance de Sainte
Austreberthe.
Une confrérie d’Hommes-Loups, le
Loup-Vert
un jeune garçon et une jeune fille.
Un banquet bien arrosé le soir de
la Saint-Jean.
La confrérie défile en ville en procession. Un Loup fouette
des membres de la confrérie.
|
Le 11 juin, les Matralia.
Les Bonnes Dames romaines,
symbolisant les deux soeurs la Bonne Nuit et l’Aurore, fouettent
et chassent du temple la Mauvaise Nuit.
Les matrones faisaient ce jour là des pains cuits dans un pot,
symbole du soleil naissant. |
Sainte Austreberthe
Le mythe est ici inversé : Sainte
Austreberthe est chassée par Aurée (« l’Aurore ») du
monastère.
Sainte Austreberthe rentre dans un four pour « sauver » des
pains menacés de brûler. C’est l’Aurore s’occupant des
soleils naissants. |
Le 13 juin, les Quinquatrus
Minusculae.
La confrérie des flûtistes défile
en ville en robe longue et avec des masques.
Cette fête commémore la
stimulation violente de l’Aurore, trop lente ou paresseuse.
L’Aurore fainéante, en Inde, est perçue comme roulant sur
un lourd chariot très lent au bord duquel se trouve le soleil
attendu. |
23 juin : Saint Jean
La confrérie des Loups défile avec
de longues robes et des bonnets pointus.
Sainte Austreberthe et son âne sont attaqués par un
homme-loup. Un loup remplace l’âne pour un service meilleur.
C’est un âne, portant une charge de linge blanchi qui symbolise
le chariot trop lent de l’Aurore portant le nouveau soleil. |
Le 20 juin : fête de Summanus,
représentation nocturne du dieu de l’Orage.
C’est le dieu « montant » qui,
dans la période de réduction des journées, va stimuler
l’Aurore.
Des pains ronds et jaunes symbolisant le soleil sont offerts à
cette occasion. |
Le 23 juin, fête de la
Saint-Jean et élection du Loup Vert qui est brûlé. Ses
braises rallumeront le foyer lors du solstice d’hiver (Noël),
bouclant la période des 6 mois de réduction des jours et
relançant le processus de grandissement.
Un énorme pain béni pour cette occasion. |
Sainte Austreberthe et la confrérie
des Loups sont une survivance de rites païens destinés à l’Aurore.
Mais quel est l’origine du mythe ? Gauloise, germanique ou romaine
? Il est troublant que le mythe de la sainte et de la confrérie
des Loups, offre une une vision globale des épisodes de l’Aurore.
Par conséquent, le mythe de Sainte Austreberthe peut être issu
d’une version plus archaïque, ayant conservée toute sa cohérence,
peut-être gauloise, préservée par le clergé druidique, et qui a
survécu jusqu’au christianisme.
Bibliographie
Georges Dumézil, La saison de
l’Aurore, Mythe et Epopée III, Gallimard, 1995.
G. Dumézil, La religion romaine
archaïque, Payot, 2000, page 352-356.
Vincent Samson, Les Berserkirs, les
guerriers-fauves dans la Scandinavie ancienne, Presses
Universitaires du Septentrion, 2011.
Abel Bergaigne, La religion védique
d’après les hymnes du Rig Veda, tome II, 1883.
Création : 17/04/2019
Création : 17/04/2019
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